ODE XII

Tirée du Psaume CVI: Confitemini Domino quoniam bonus.
ARGUMENT Les misères d'un long exil et les miséricordes du Seigneur sont énergiquement décrites dans ce psaume. Il est un peu différent des autres dans sa constitution poétique. Il contient deux refrains intercalaires, répétés quatre fois chacun, et qui lui donnent une grâce particulière et un tour original. Ces deux refrains sont et clamaverunt ad Dominum ... confiteantur Domino misericordiae jus.


Rendez gloire au Seigneur, à sa bonté suprême,
Attribut éternel, divin comme lui-même,
Qu'Israël trop rebelle éprouva tant de fois.
Que ceux qu'il racheta nous redisent encore,
Qu'errants et dispersés du couchant à l'aurore,
Leur Dieu les rassembla, les unit sous ses lois.

Des Hébreux égarés dans des sables funestes
La soif, la faim, la mort suivaient les tristes restes;
Il entendit leurs cris, il conduisit leurs pas.
L'héritage promis leur rendit l'abondance:
Célébrez du Seigneur l'ineffable clémence,
Annoncez aux mortels les oeuvres de son bras.

Ils étaient accablés de besoins et de peines;
Courbés sous leur misère autant que sous leurs chaînes,
Les ténèbres, la mort les couvraient en tout lieu.
Trop digne châtiment de leurs lâches murmures,
Et des rébellions que ces peuples parjures
Opposaient si souvent aux conseils de leur Dieu.

Humiliés, proscrits, plongés dans la tristesse,
Point de secours humain qui soutînt leur faiblesse;
Il entendit leurs cris, les sauva du trépas.
De leurs maîtres cruels il brisa la puissance:
Célébrez du Seigneur l'ineffable clémence,
Annoncez aux mortels les oeuvres de son bras.

Les barrières de fer par lui sont arrachées,
Et les portes d'airain de leurs gonds détachées
Livrent à l'ennemi leurs gardes éperdus.
Ses peuples toutefois dans l'opprobre gémissent;
Mais s'ils sont malheureux, s'ils souffrent, s'ils périssent,
Ce n'est qu'à leurs forfaits que ces malheurs sont dus.

Il n'est point d'aliment que leur bouche n'abhorre;
C'est la mort, le tombeau que leur douleur implore;
Mais il entend les cris de ces enfants ingrats.
Il vient du haut du ciel hâter leur délivrance:
Célébrez du Seigneur l'ineffable clémence,
Annoncez aux mortels les oeuvres de son bras.

Qu'ils chantent avec nous le Créateur du monde,
Ces citoyens des mers qu'une ardeur vagabonde
Dès l'enfance enchaîna dans de frêles vaisseaux;
Partout de son passage ils trouvent des vestiges,
Et leurs yeux chaque jour sont témoins des prodiges
Que sa main redoutable opère sur les eaux.

Il dit: la mer se trouble, et l'esprit des tempêtes,
De ses fers échappés vole et fond sur leurs têtes;
Dans les flots entre ouverts je les vois engloutis:
Repoussés jusqu'aux cieux dans l'abîme ils retombent, E
t tels que dans l'ivresse, ils chancellent, succombent,
Sous l'orage accablés, par la crainte abrutis.

Dieu les entend alors qui l'appellent, qui prient;
Touché de leurs clameurs il accourt, les vents fuient,
La mer se tait, la foudre interrompt ses éclats.
Le nocher plein de joie adore sa présence:
Célébrez du Seigneur l'ineffable clémence,
Annoncez aux mortels les oeuvres de son bras.

Que du peuple assemblé les cantiques l'implorent;
Dans leurs sages conseils que nos vieillards l'honorent;
Il punit les méchants par des fléaux divers.
Pour les perdre il tarit les ruisseaux, les fontaines,
Empoisonne des vents les brûlantes haleines,
Et change les moissons en herbages amers.

Mais quand il veut, les eaux de leurs sources renaissent;
La terre est humectée, et les fruits reparaissent.
Il place l'indigent et le pauvre en ces lieux.
Ils peuplent la campagne, ils construisent des villes;
Les vignes et les champs redevenus fertiles
Secondent à l'envi leurs soins laborieux.

Il bénit leurs travaux, il augmente leur race.
Bientôt ces coeurs trop durs encourent sa disgrâce,
Il les frappe, les livre à de nouveaux tyrans.
Les chefs sont méprisés, le peuple est indocile,
Leur nombre diminue, et n'a plus pour asile
Que les vastes déserts où leurs pas sont errants.

Mais il les sauve encor, les remet dans sa voie;
Le pauvre est soulagé, le juste est dans la joie,
Le méchant n'ose plus blasphémer ses bienfaits.
Quel homme observera ces traits de sa puissance,
Et quel autre assez sage, admirant sa clémence,
Des bontés du Seigneur concevra les effets?



 

ODE XIII

Tirée du Psaume CXVIII: Beati immaculati in via.
ARGUMENT David emploie tout ce poème à témoigner son amour pour la loi de Dieu, sa confiance en sa miséricorde, et son horreur pour le péché. C'est le plus long et le plus beau de tous les psaumes. C'était aussi le plus difficile à mettre en vers. L'arrangement en est d'ailleurs assez singulier. C'est un ouvrage accrostiche. Il contient autant de couplets de huit vers qu'il y a de lettres dans l'alphabet hébreu. Les vers de chaque couplet commencent chacun par la même lettre. Je me suis bien gardé d'imiter en cela le Prophète. Ce n'eût pas été le traduire, c'eût été le travestir. J'ai partagé cette ode en six divisions.


PREMIÈRE DIVISION

Heureux le coeur juste et sans tache
Qui vers son Dieu marche avec foi;
Heureux celui qui ne s'attache
Qu'aux saints préceptes de sa loi;
Qui recherchant ses clartés pures,
Est inaccessible aux souillures
De l'odieuse iniquité,
Et ne sort point des routes sûres
Où le conduit la vérité.

Quand Dieu parle, quand il ordonne,
Si je suis toujours prêt d'agir,
A l'aspect des lois qu'il me donne,
Mon front n'aura point à rougir.
Je le sais trop, ta main propice,
Seigneur, pour que je les remplisse,
Dans mon coeur a gravé leurs traits.
Je conserverai ta justice,
Mais ne m'abandonne jamais.

Qui réformera la jeunesse
Dans ses emportements fougueux?
C'est un rayon de ta sagesse
Qui règle l'essor de nos voeux.
Je l'implore, je la reclame:
Laisse-moi cette auguste flamme,
Trésor qu'en mon sein j'ai caché,
Rempart dans le fond de mon âme
Contre les assauts du péché.

De cette sagesse suprême
Je bénirai les monuments.
Tu m'instruis, Seigneur, et que j'aime
A raconter tes jugements!
Quelle richesse s'y déploie!
Je méditerai dans ta voie
Les biens d'un heureux avenir.
Ta parole fera ma joie,
Et remplira mon souvenir.

Fais que pour toi seul je respire,
Rends-moi fidèle à tes décrets.
Ouvre mes yeux, et que j'admire
Les merveilles de tes secrets.
Mon âme ici bas étrangère,
Dans sa demeure passagère,
Soupire après toi nuit et jour.
Elle craint son juge, elle espère,
Elle brûle et languit d'amour.

Les superbes et les rebelles
Portent ta haine sur leur front.
Je fuis leurs routes criminelles,
Loin de moi l'opprobre et l'affront.
Les grands du monde en leurs caprices
Ont puni de mille injustices
Mon attachement à ta loi;
Mais je ne cherche de délices,
De force et de conseil qu'en toi.

Vrai dans l'effet de tes promesses,
Relève un pécheur prosterné;
J'ai fait l'aveu de mes faiblesses
Seigneur, et tu m'as pardonné.
Assure en moi le caractère
D'un mortel repentant, sincère,
Tout occupé de ta grandeur.
Mon âme au bruit de ta colère
Se dissout presque de terreur.

Dans l'aversion du mensonge
Forme et nourris mes sentiments.
Mon esprit ne pense, ne songe
Qu'à tes divins commandements.
Ouvre mon coeur à ta sagesse,
Et n'ôte point à ma faiblesse
L'appui visible de ton bras;
Rien n'égalera ma vitesse
Quand je marcherai sur tes pas.

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SECONDE DIVISION

Seigneur, dans tes sentiers que ton flambeau m'éclaire.
Qu'il me guide à jamais, et m'enseigne à te plaire;
Sauve mon coeur, mes yeux de tout funeste écueil:
Qu'attachés aux seuls dons que tes mains leur envoient,
            Avec horreur ils voient
            L'avarice et l'orgueil.

Soutiens un serviteur qu'a pénétré ta crainte;
Ta suprême équité dans tes lois est empreinte;
Ne m'abadonne pas aux mépris des mortels.
Tu promis à mes voeux la vie et la justice;
            Que ta grâce accomplisse
            Tes traités solemnels.

A ceux dont la fureur m'insulte et me désole,
Je dirai que j'espère en ta sainte parole,
Que ton oeil suit nos pas, et que tu nous entends.
O dépôt précieux, ô parole immortelle,
            Gage auguste et fidèle
            Du bonheur que j'attends!

Dans les siècles futurs, dans l'éternité même,
Je garderai ta loi, qui m'instruit et qe j'aime;
Pour ta gloire en tous lieux je porterai mes pas.
Dans les palais des rois j'irai plein d'assurance
            Annoncer ta puissance,
            Et n'en rougirai pas.

Commande, je suis prêt, commande; ordonne encore;
Que tes ordres sont doux! Seigneur, je les adore:
Ils remplissent mon âme, ils l'occupent toujours.
Souviens-toi qu'en ton nom tu veux que l'homme espère;
            Ce nom dans ma misère
            Est un puissant secours.

La loi que je professe et l'amour de ton culte
De l'impie orgueilleux m'ont attiré l'insulte,
Mais ses discours moqueurs ne m'ont point ébranlé;
Et de tes jugements rendus dans tous les âges,
            Les nombreux témoignages
            M'ont d'abord consolé.

Au seul nom d'apostat mon sang d'effroi se glace;
Mais ta divine loi qu'avec ardeur j'embrasse,
Dans ce terrestre exil fait l'objet de mes chants.
Pour te les adresser je devance l'aurore,
            Et ma bouche t'implore
            Par des hymnes touchants.

Je l'ai dit: le Seigneur est mon bien, mon partage.
Sa grâce est le secours, sa gloire est l'héritage
Qu'il accorde aux soupirs, aux oeuvres des humains.
J'ai connu mes erreurs, et frappé de lumière,
            J'entre dans la carrière
            Par de nouveaux chemins.

Je cours, Seigneur, je vole où mes devoirs l'ordonnent.
Tes ennemis en vain de pièges m'environnent,
Je marche d'un pas ferme au signal de ta voix.
Dans la profonde nuit quand l'univers sommeille,
            Tout à coup je m'éveille
            Pour méditer tes lois.

Sur mes désirs confus que tes volontés règnent;
Inséparable ami des mortels qui te craignent,
De leur fidélité je partage l'honneur.
De tes bontés, grand Dieu, que la source est féconde!
            Tous les peuples du monde
            Y puisent leur bonheur.

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TROISIEME DIVISION

Oui j'ai fait l'expérience
De tes divines bontés;
Ajoutes-y la science
De tes saintes volontés.
Loin de marcher sur tes traces,
J'ai provoqué mes disgrâces
Par d'affreux égarements;
Mais, grand Dieu, ton coeur de père
Par de nouveaux biens tempère
La rigueur des châtiments.

Les médisants avec rage
Contre moi lancent leurs traits.
Ta loi dans ce triste orage
Me soutient par ses attraits.
Mais quand mon âme s'y livre,
Le fier mondain ne s'enivre
Que d'impures voluptés.
Ta justice a dû paraître,
Et tu m'apprends à connaître
Le prix des adversités.

Austère et douce justice,
Plus précieuse que l'or!
Des bienfaits d'un Dieu propice
Je possède le trésor.
Tu formas mon existence,
Donne-moi l'intelligence
De tes préceptes parfaits;
Tes adorateurs fidèles
Loûront tes bontés nouvelles
Dans les biens que tu me fais.

De ta vengeance sévère
Je reconnais l'équité;
J'ai subi de ta colère
L'arrêt trop bien mérité.
Oublie à présent mon crime;
Console enfin ta victime,
Et conserve encor ses jours:
Je n'en prétends faire usage
Que pour t'aimer davantage,
Et pour te servir toujours.

Que le désespoir accable
Mes superbes ennemis.
Pour moi plus j'étais coupable,
Plus je te serai soumis.
Que celui qui craint ta haine,
Que ceux que ton culte enchaîne,
Secondent tous mon ardeur;
Qu'en ta loi je persévère,
Et que rien jamais n'altère
La pureté de mon coeur.

Trop nourri de ta promesse,
Ce coeur languit abattu.
Mes yeux te disent sans cesse,
Quand me consoleras-tu?
Mais dans ma douleur mortelle,
Ta sagesse me rappelle
Ses immenses profondeurs.
Quel terme auront mes souffrances?
Quand s'armeront tes vengeances
Contre mes persécuteurs?

Les méchants vers leurs abîmes
M'ont conduit tant qu'ils l'ont pu;
Leurs détestables maximes
M'avaient presque corrompu.
Sauve-moi de leur malice;
Mon amour pour ta justice
Les soulève contre moi.
Malgré leur ligue farouche,
Les oracles de ta bouche
Dissiperont mon effroi.

Ta vérité, ta parole
Ont leur trône dans le ciel;
De toi-même vrai symbole,
Leur empire est éternel.
Rien n'est créé, rien ne dure,
Rien n'agit dans la nature,
Grand Dieu, que pour te servir;
Je te dois un juste hommage
Des jours qu'au sein de l'outrage
La mort allait me ravir.

Qu'un nouveau lien resserre
Ta justice et mon amour.
Les pécheurs me font la guerre,
Me poursuivent nuit et jour;
Pour éviter leurs vengeances,
Rempli de tes ordonnances,
A toi je me suis uni.
J'ai vu les oeuvres mortelles;
Tout est imparfait en elles,
Et Dieu seul est infini.

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QUATRIEME DIVISION

O que ta loi me plaît! par elle instruit sans cesse,
J'ai de mes ennemis trompé la fausse adresse,
            Et les malins regards.
J'ai des plus grands docteurs surpassé la science,
Et j'ai par mes conseils vaincu l'expérience
            Des plus sages vieillards.

J'ai détourné mes pas de tout sentier oblique;
Soumise à tes decrets, mon âme ne s'applique
            Qu'à tes enseignements.
Que ta parole est douce, et que j'aime à l'entendre!
J'abhorre le mensonge, et m'attache à comprendre
            Tes divins jugements.

Ta parole, Seigneur, est l'astre qui me guide;
J'ai juré de le suivre, et mon coeur moins timide
            Accomplira ce voeu.
J'ai langui, j'ai souffert, que ta main me soulage,
Et que mes chants nouveaux pour toi soient un hommage
            Digne de ton aveu.

Mon âme à chaque instant à me quitter s'apprête.
Le piège est sous mes pas, le glaive est sur ma tête,
            Mais tu soutiens ma foi.
Elle fait mes plaisirs, elle est mon héritage,
Et m'annonce les biens dont je trouve le gage
            Dans ton heureuse loi.

Ennemi des méchants, à tes ordres docile,
J'ai cherché dans toi seul un rempart, un asyle,
            Et l'espoir de mes jours.
Je fuis loin de l'impie, et te sers avec joie;
Fais que de mes tourments je ne sois pas la proie,
            Quand j'attends ton secours.

Aide-moi, je vivrai. Foule aux pieds et disperse
Des prévaricateurs la nation perverse
            Qui blasphème son roi.
Que de tes jugements la terreur m'environne;
Que tout mon sang se glace et que ma chair frissonne
            D'un salutaire effroi.

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CINQUIÈME DIVISION

Seigneur, j'ai chéri la justice,
Défends-moi de l'iniquité.
Ne permets pas que le caprice
Ni que la force me ravisse
Le repos que j'ai mérité.

Je sens une langueur mortelle
Dans mes yeux à pleurer constants.
Eclaire un serviteur fidèle;
Victorieuse par mon zèle,
Que ta loi parle, il en est temps.

On la méprise, et je l'estime
Plus que la topaze et que l'or.
Elle a fermé mon coeur au crime,
Et son instruction sublime
Vers toi dirige mon essor.

Du feu que tes discours répandent
Ta parole m'a pénétré;
Partout ses rayons purs s'étendent:
Les petits, les simples l'entendent,
Et mon coeur en est altéré.

Oui, tu vois d'un oeil favorable
Les adorateurs de ton nom.
Confonds l'ennemi qui m'accable,
Et de tout sentiment coupable
Guéris mon âme et ma raison.

Illumine enfin les pensées
Du dernier de tes serviteurs.
Sur mes transgressions passées,
Toujours à mes yeux retracées,
J'ai versé des ruisseaux de pleurs.

Dieu pour modèle nous propose
L'equité de ses jugements;
Et le zèle ardent de sa cause
Me consume, hélas! quand on ose
Profaner ses commandements.

Seigneur, tes paroles sont pures
Comme l'argent sorti du feu.
Je suis faible, en butte aux injures;
Mais que m'importent ces blessures
Si je remplis l'oeuvre de Dieu?

Car ta justice est éternelle,
Et ta loi c'est la vérité.
Je meurs, mon angoisse est cruelle;
Mais si je suis trouvé fidèle,
Je vivrai dans l'éternité.

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SIXIÈME DIVISION

        Aux cris perçants de ma prière
        Accours à mon aide, ô Seigneur;
        Que ta doctrine dans mon coeur
        Par tes soins se conserve entière.
        Mes tristes yeux qui dans la nuit
        Ne ferment jamais leur paupière,
T'adressent leurs regards sitôt que le jour luit.

        Seul auteur de mon espérance,
        Vois mes ennemis forcenés,
        Par la soif du crime entraînés,
        Fuir, s'éloigner de ta présence.
        Mais tu te rapproches de moi,
        Et ton équité récompense
Mon respect, mon amour, mon zèle pour ta loi.

        Considère mon infortune;
        Tu sais que dans mes maux secrets,
        L'observance de tes décrets
        Ne me fut jamais importune.
        Je mets ma cause entre tes mains,
        Avec la tienne elle est commune;
Sauve à la fois mes jours et tes droits les plus saints.

        Livrés à ta haine implacable,
        Le salut est loin des pécheurs.
        Mais pour les justes, tes faveurs
        Sont un trésor inépuisable.
        Sauve-moi donc par ton appui;
        Plus d'un persécuteur m'accable,
Et de leurs noirs complots l'effort m'a toujours nui.

        Toutefois, malgré ces obstacles
        Je t'offrais des hommages purs.
        Je séchais quand des coeurs trop durs
        Se refusaient à tes miracles.
        Je chéris tes soins paternels,
        Et je dirai que tes oracles
Sont comme toi, Seigneur, vrais, justes, éternels.

        Par des puissances redoutées
        Qu'injustement je sois haï,
        Je ne crains que d'avoir trahi
        Les lois par ta bouche dictées;
        Moi qui préfère leur douceur
        Aux dépouilles ensanglantées
Qu'emporte sur son char un superbe vainqueur.

        Pour l'imposture rien n'égale
        Et mon horreur et mon mépris.
        Je chante avec tes favoris
        Ta justice aux méchants fatale.
        Heureux qui l'adore à jamais!
        Il n'est point pour lui de scandale,
Son âme est le séjour du calme et de la paix.

        J'attends, Seigneur, que tu pourvoies
        Au sort d'un mortel attristé.
        Tes ennemis ont résisté
        Aux ordres que tu nous envoies;
        Avec ardeur je les remplis,
        Car tu connais toutes nos voies,
Et du coeur des humains tu perces les replis.

        Que ma prière dégagée
        Des liens d'un terrestre effroi
        Monte et s'arrête devant toi
        Par tes serments encouragée.
        Grand Dieu, qui vois les aggresseurs
        Par qui mon âme est ravagée,
Etends sur moi ta main, confonds mes oppresseurs.

        Dans ta justice et ta sagesse
        Quand tu m'auras initié,
        A tes élus associé,
        Mes hymnes te loûront sans cesse.
        Tu daignas écouter ma voix,
        Lorsqu'au milieu de ma tristesse,
J'invoquais ton secours en méditant tes lois.

        Dieu puissant, ta grâce féconde
        Retentira dans mes concerts.
        J'ai longtemps fui dans les déserts
        Comme une brebis vagabonde;
        Tu suivis mes pas égarés,
        Et guéri des erreurs du monde,
Je t'apporte des voeux à toi seul consacrés.


Odes XIV - XIX
Odes I - V
Odes VI - XI